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Comment tenir sa gouge quand on sculpte ?

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Si la taille du bois en sculpture se fait à l’aide de gouges, c’est la qualité du maniement de celles-ci qui va déterminer la qualité de la sculpture, sans même parler de la sécurité du sculpteur. La tenue des gouges en sculpture a donc une double importance : assurer la qualité du travail produit ET la sécurité du sculpteur.

Il ne faut donc pas passer à côté de cette étape capitale de l’apprentissage des bases de la sculpture.

On tient toujours sa gouge avec ses deux mains (hors frappes) en sculptant en s’éloignant de soi, jamais vers soi. Il existe deux manières de manipuler sa gouge : la tenue de la gouge « couchée » et la tenue de la gouge « debout ». Avec ces deux positions, vous maîtriserez la majorité des situations de sculpture.

Pourquoi ces deux positions en particulier ? Parce que ce sont celles qui vous procurent le plus de sécurité, d’ergonomie, de contrôle et d’efficacité pour faire face à l’infinie variété des situations de sculpture.

Quelles sont les principes de base pour tenir sa gouge ?

A tout moment, les deux mains sur la gouge

Sauf lorsque la gouge est frappée, vos deux mains doivent à tout moment se trouver sur la gouge.

Cela a un double avantage :

  • Le contrôle de la gouge est largement supérieur
  • Cela assure qu’aucune des mains ne se trouve devant le tranchant de la gouge

Pour assurer cette règle, il faut bien sûr que votre pièce soit parfaitement tenue sur votre table ou votre établi. Autrement dit, votre pièce ne doit jamais nécessiter que vous la teniez avec une main pour pouvoir sculpter.

Pour un meilleur contrôle de votre gouge, une main est toujours positionnée sur la partie « métal » et l’autre toujours sur la partie « bois ». Je vais détailler plus bas la position exacte de chaque main pour chacune des deux positions principales. Mais en attendant, garder en tête cette règle de base : une main sur le métal, une main sur le bois.

Toujours sculpter vers l’extérieur, jamais vers soi

Une fois la gouge en main, vous devez pouvoir sculpter sans jamais vous blesser. La condition non négociable pour arriver à ce résultat est de toujours sculpter vers l’extérieur, c’est à dire en s’éloignant de soi, ne serait-ce que sur le côté. Il ne faut donc JAMAIS sculpter vers soi, c’est à dire le tranchant de la gouge dirigée vers vous.

Si vous pensez être obligé de tenir la gouge vers vous pour sculpter, c’est que vous n’avez pas envisagé deux autres solutions :

  • Vous décaler sur le côté pour manier votre gouge de manière latérale, quitte à « grimper » un peu avec votre buste sur votre établi,
  • Déplacer votre pièce en la retournant sur votre établi pour pouvoir sculpter « dans le bon sens » (c’est à dire en s’éloignant de soi).

Sculpter des deux côtés : « main droite » comme « main gauche »

Contrairement à l’écriture, qui est une pratique codifiée sur un plan et dans une direction donnée, une sculpture prend forme sur différents plans et dans toutes les directions. Alors ce qui est valable en écriture (ne pouvoir écrire que d’une main dominante) ne l’est absolument pas en sculpture.

Pour sculpter, il faut idéalement pouvoir être à l’aise dans toutes les configurations et dans tous les sens. Je vous conseille donc fortement de prendre l’habitude de sculpter en changeant régulièrement vos mains de sens pour positionner la gouge dans la bonne direction en gardant toujours la même qualité de contrôle.

Pratiquez donc dès vos débuts la sculpture en tenant votre gouge « main droite » comme « main gauche ». Au besoin, forcez-vous à le faire lors d’exercices. Et ne vous en faîtes pas si une des positions vous paraît un peu moins maîtrisée au départ. Votre cerveau et votre corps sont des merveilles d’adaptation. En peu de temps, vous en viendrez presque à ne plus savoir quel est votre côté dominant.

Comment tenir sa gouge « couchée » ?

Comme expliqué en introduction, la tenue de la gouge « couchée » est une des deux tenues de la gouge à connaître pour maîtriser la grande majorité des situations de sculpture.

Prise de la gouge « couchée » :

  • La main qui tient le métal se pose sur la pièce (ou sur l’établi). La partie métal est tenue à pleine main, pouce vers le manche.
    • C’est la main qui positionne le tranchant et « freine » l’avancée de la gouge, augmentant ainsi le niveau de contrôle de la coupe du bois.
  • L’autre main prend le manche, pouce en direction du métal
    • C’est la main qui pousse la gouge et la fait donc avancer. Elle contrôle aussi la direction de la gouge (orientation générale) et la rotation du tranchant.
  • les deux pouces se « rejoignent » sur le manche
La main qui tient le manche est celle qui pousse, la main « métal » est celle qui freine ou autrement dit « contrôle » l’avancée de la gouge.

Selon les sculpteurs, certains disent qu’il faut tenir la partie métal à deux doigts seulement, d’autres à trois doigts, d’autres dans telle ou telle configuration. Ne vous encombrez pas trop de ces détails qui, de mon point de vue, révèlent plus des préférences personnelles érigées en règle absolue.

Gardez en tête le principe général : une main sur le métal posée sur la pièce, une autre sur le manche les deux pouces se faisant face. Avec l’expérience, et de manière tout aussi personnelle, vous en viendrez à vos propres conclusions sur la position idéale de chaque main.

Quand utilise-t-on la prise « couchée » ?

Cette prise sert pour toutes les coupes linéaires sur la surface de la pièce : ébauche des fonds et des volumes, burinage, finitions de surface, etc…

Elle peut bien sûr aussi servir pour des configurations où la main « métal » n’est pas tout à fait posée sur la pièce mais prend un peu d’angle. Mais disons que cette prise sert principalement pour une configuration « main posée sur la pièce ». Rapidement, si vous devez sculpter avec un angle important, mieux vaut changer de prise et tenir votre gouge avec la prise « debout » car cette dernière est alors plus précise en terme de contrôle.

Comment tenir sa gouge « debout » ?

Lorsqu’on a besoin de tenir sa gouge à la verticale ou avec un angle important par rapport à la surface de la pièce sculptée, la prise « debout » est la prise de choix pour tenir sa gouge avec finesse et contrôle.

Prise de la gouge « debout » :

  • la partie métal est tenue à la manière d’un crayon à l’aide du pouce, de l’index et du majeur.
    • Cette tenue « crayon » n’est pas stricte car, en fonction des situations, les doigts se positionnent différemment mais l’idée générale est bien celle du crayon.
    • C’est la main qui contrôle la position du tranchant, position qui peut être évolutive.
Pour la prise « debout » de la gouge, la main « métal » saisit l’outil à la manière d’un crayon.
Notez la position du majeur à la base de la gouge pour former une butée.
  • Le manche est tenu à pleine main pouce vers le haut.
    • C’est la main qui contrôle la force de coupe, l’angle et le mouvement de pivot de la gouge.

Quand utilise-t-on la prise « debout » ?

La prise debout est utilisée principalement pour le travail des contours d’un bas-relief, des changements de plans abrupts, des incisions, en lettrage et pour tout autre détail nécessitant la tenue verticale de la gouge.

La prise verticale est aussi utilisée dans une variante lors de la « frappe » des contours d’un modelé d’un bas-relief par exemple (voir plus bas la « tenue de la gouge lors des frappes »).

Comment positionner son corps quand on tient sa gouge ?

Pour bien manier sa gouge, il faut savoir la tenir correctement dans ses mains. C’est ce que nous avons vu dans les chapitres précédents. Mais pour être vraiment efficace, la seule tenue dans les mains ne suffit pas.

La sculpture sur bois est un art du corps. La gouge et les mains qui la manient sont le débouché d’un positionnement de l’ensemble du corps pour arriver à impulser au tranchant le bon mouvement avec la bonne puissance. S

  • Les avant-bras et les poignets peuvent servir d’étais pour positionner sa gouge de manière stable, mais aussi souvent de point de pivot pour faire glisser celle-ci selon un certain rayon de courbure.
  • Sauf rare exception, les coudes sont près de votre buste pour accentuer la stabilité générale de vos bras (et donc de vos mains).
  • Le buste et avec lui l’ensemble de votre corps doit toujours être au plus près de la gouge, penché sur elle non seulement pour voir ce que vous faîtes mais pour transmettre la puissance du corps à vos mains, parfois presque à la manière d’un joueur de rugby poussant son adversaire.
    • Il n’y a pas de posture prédéfinie pour sculpter, seulement la conscience de toujours devoir aligner son corps de manière à pouvoir transmettre le plus de puissance et de stabilité à l’outil en fonction des besoins.
Ici pour du lettrage, le corps est penché au plus près de la gouge, le buste faisant pression sur la gouge,
les coudes près du corps pour accroître la stabilité de l’outil.
  • Pensez aussi au placement de vos jambes, elles doivent procurer de la stabilité à votre corps pour transmettre sa puissance à vos bras puis vos mains. Un peu à la manière d’un boxeur une des meilleures position est une jambe en avant et une jambe à l’arrière, à la fois pour la stabilité et la transmission de puissance.

Comment tenir sa gouge lors des frappes ?

Quand a-t-on besoin de frapper sa gouge (son burin ou son fermoir) ?

Il y a plusieurs occasions où frapper votre gouge, burin ou fermoir à l’aide d’une mailloche et d’une massette est particulièrement recommandé :

  • Pour les sculptures sur bois durs,
  • Lors d’utilisation de gouges larges (pour du ronde-bosse par exemple ou lors de sculptures de bols, « kuksas » ou saladiers),
  • Pour sculpter de manière particulièrement controlée avec de petites frappes par à-coups,
  • Et bien sûr pour la « frappe » des contours d’un modelé ou toute autre forme spécifique (dans le travail des bas-reliefs, notamment)

A chaque situation de frappe sa manière de tenir sa gouge

  • Pour de l’ébauche avec des gouges larges, on tient généralement sa gouge d’une main par le manche et la mailloche ou la massette de l’autre. Cela assure la meilleure prise de la gouge pour des frappes fortes et nécessitant moins de contrôle. La main qui frappe peut tenir l’outil de frappe par le manche pour plus de puissance.
  • Pour sculpter des détails précis de manière linéaire sur le bois, on tiendra la partie métal de la gouge d’une main avec généralement au moins le pouce et l’index sur le manche (équivalent à la prise « couchée ») de manière à maintenir la gouge au bon angle. La main qui frappe tient généralement l’outil de frappe à pleine main (et non par son manche) afin d’être plus précis et plus « doux » dans ses frappes.
  • Pour l’opération de « frappe » des contours d’un modelé pour un bas-relief, on tient d’abord sa gouge à deux mains en prise debout avec la main tenant le manche seulement à deux doigts afin de conserver la mailloche dans la main. La main tenant le métal place alors le tranchant de manière précise selon le contour avec la prise « crayon ». Une fois la gouge ainsi placée, on permute la main « métal » sur le manche dans une prise à pleine main tandis que la main qui était initialement sur le manche peut maintenant se libérer pour la frappe.

Peut-on frapper sa gouge avec sa main ?

Par principe, et contrairement à ce que conseillent certains ouvrages, je conseille d’éviter de frapper la gouge avec la paume de la main. En effet, les anciens sculpteurs n’avaient pas que de bonnes habitudes en matière de santé au travail…

Si une petite frappe par-ci, par-là ne vous fera guère de mal, il faut surtout éviter d’en faire une habitude.

La main est un outil merveilleux, puissant et capable des opérations les plus complexes, mais c’est aussi un outil fragile si on n’en prend pas suffisamment soin. Mieux vaut éviter d’endommager les nombreux nerfs et tendons qui passent sur la paume de la main.

Il est de toute façon tout aussi efficace, voire plus, de frapper votre gouge avec une mailloche alors pourquoi s’en priver. Un morceau de bois ou de métal ne nécessitera jamais de chirurgie réparatrice complexe et coûteuse, votre main si.

Comment poser ses gouges lorsqu’on sculpte ?

Bien tenir sa gouge est une chose mais pouvoir changer de gouge efficacement en fonction de vos besoins est un atout supplémentaire.

Pour bien visualiser vos gouges, éviter de vous blesser et de les désaffûter en les saisissant et les prendre rapidement en minimisant les manipulations, une des meilleures configurations est de sortir les outils qu’il vous faut pour sculpter sur votre établi alignés devant vous et votre sculpture. Idéalement, et quelque soit votre mode de rangement de vos outils lorsque vous ne sculptez pas, ils ne doivent être ni dans un étui, ni dans une caisse à outils, ni le long du mur de votre atelier.

A vous de voir quel ordre vous voulez donner à cet étalage sur votre établi. Pour ma part, je place généralement les fermoirs et gouges plates à gauche sur mon établi, le ou les burins au centre et les gouges mi-creuses et creuses à droite par ordre croissant de numéro. Ainsi quand je sais avoir besoin de tel ou tel type d’outil, ma main se dirige naturellement et rapidement vers le bon « secteur » pour trouver l’outil qu’il me faut.

La position idéale d’accès à ses outils lors des périodes de sculpture est de les étaler sur l’établi.
A chacun sa méthode de rangement mais comme exemple voici la mienne : fermoirs et gouges plates à gauche, burin au centre et gouges mi-creuses et creuses à droite

Si vous êtes débutants et que vous voulez acheter vos premières gouges, je vous conseille mon article « Choisir ses gouges quand on débute en sculpture bois » qui vous détaillera le rôle de chaque gouge et les options de choix pour vos premiers achats en fonction de votre budget.