Le travail du bois est une activité qui peut potentiellement provoquer des blessures. La sculpture au couteau n’échappe bien sûr pas à cette règle. Alors pour ceux qui sont soucieux de ne pas se couper avec leur couteau la question de la protection (des mains et du reste du corps) se pose tout naturellement.
La protection à l’aide d’un gant ou d’un tablier n’a rien d’obligatoire, beaucoup de sculpteurs sculptent en toute sécurité sans ces protections. En effet la protection à l’aide de gants et/ou d’un tablier n’est qu’une des nombreuses dimensions contribuant à la sécurité en sculpture. Mais si vous choisissez d’en porter, différentes options existent sur le marché.
Cet article vous propose de passer en revue les choix qui s’offrent à vous en matière de sécurité pour sculpter au couteau.
- Doit-on porter des protections pour sculpter du bois au couteau ?
- Quelles sont les précautions à prendre pour ne pas se blesser avec des outils de sculpture ?
- Quelles sont les protections possibles pour sculpter au couteau ?
- Faut-il porter des protections comme pour le travail du bois avec machine : masque, lunettes, casque anti-bruit ?
- Quelle trousse de premiers secours en cas de coupure quand on sculpte ?
Doit-on porter des protections pour sculpter du bois au couteau ?
Clairement la réponse est non. Il n’est pas nécessaire de porter des protections pour sculpter du bois au couteau sans se blesser.
Il est tout à fait possible de pratiquer son activité favorite en toute sécurité sans protection (notez la différence subtile que je fais entre la notion de sécurité et celle de protection…voir le chapitre suivant).
Personnellement, je sculpte et ai toujours sculpté sans aucune protection spécifique et la vaste majorité des sculpteurs au couteau que je connais pratique également cette activité sans protection.
Sont-ils inconscients pour autant ? Non.
Leur sécurité tient à un ensemble de facteurs qu’ils ont progressivement appris à maîtriser (voir « sphère de sécurité » au chapitre suivant).
Evidemment ce fait à lui seul ne détermine pas de la validité du port de protection ou non. Il arrive bien sûr à peu près à tout le monde de se couper à l’occasion : généralement de petites coupures sans conséquence. Cela souligne simplement que le port de gants anti-coupure ou de tout autre protection est le fait d’un choix personnel, non d’une norme absolue garantissant l’absence de blessure.
Mais par ailleurs, vous pouvez tout à fait porter des protections (notamment sur la main qui tient l’objet à sculpter) si vous préférez opter pour ce type de protection dite passive. Et ce d’autant plus que des progrès notables en matière de tissus modernes ont été fait ces dernières années sur les gants de protection dits anti-coupure. Certains sculpteurs au couteau très expérimentés en portent d’ailleurs toujours lorsqu’ils sculptent.
A noter tout de même, le port de gants n’est pas anodin dans la qualité de la préhension et des sensations fines que l’on a avec nos mains et nos doigts tout particulièrement.
Or, il faut être vigilant sur la fait que la qualité de cette préhension digitale et de ces sensations fines est un des facteurs contribuant à la sécurité globale en sculpture au couteau.
Encore une fois donc, le choix de porter un ou des gants est un choix tout à fait personnel.
Pour ma part je ne souhaite pas porter de gant justement car je trouve que cela limite la maîtrise de ma sécurité du fait de cette entrave d’une part non négligeable de mes sensations.
Quelles sont les précautions à prendre pour ne pas se couper avec ses outils en sculpture ?
Comme préciser au chapitre précédent, vous pouvez choisir de ne pas vous munir de protections spécifiques mais néanmoins sculpter en toute sécurité pour vous comme pour ceux qui vous entourent.
J’ai développé un système de sécurité en sculpture que j’ai déjà publié dans un article précédent (« Sculpter du bois au couteau : gestes de base et sécurité ») et que j’appelle la « sphère de sécurité ».
Je vous la rappelle ici pour que vous ayez bien en tête les paramètres qui régissent votre sécurité quand vous sculptez. Je vous suggère vivement de passer en revue cette grille rapidement à chaque session de sculpture, cela vous évitera bien des blessures :
Sphère | Elément | Question | Action |
---|---|---|---|
ENVIRONNEMENT | Les autres | Où sont les autres ? | Mettre de la distance (1m) Sculpter dans le calme (son et mouvement) |
Les objets | Où sont les objets autour de moi ? | Désencombrer | |
L’équipement | Mon assise est-elle stable ? | Assise adéquat | |
Les premiers secours | Suis-je prêt en cas d’accident ? | Trousse de Premiers Secours Téléphone chargé (112/15/18) Formation (PSC1 à jour) | |
CORPS | Ma posture | Comment est ma posture quand je sculpte ? Où peut finir mon geste ? | Bonne posture pour chaque geste |
Ma fatigue | Suis-je assez reposé pour une concentration accrue et une gestuelle tonique et maîtrisée ? | Pauses régulières | |
Mes mains | Où se trouve la main qui tient l’objet à sculpter ? Est-ce que je maîtrise bien mon geste de sculpture ? | Gestes appropriés Bonne position des mains pour chaque geste. | |
OUTIL | Mon couteau | Est-il approprié à ma pratique ? Est-il bien affûté ? Est-il bien rangé ? | Outil adapté et bien affûté quand on s’en sert Bien rangé quand on ne s’en sert plus |
Quelles sont les protections possibles pour sculpter au couteau ?
Pour ceux qui font le choix d’ajouter à leur « sphère de sécurité » une protection anti-coupure spécifique, le choix est assez vaste : gants anti-coupure, sparadrap de protection des doigts, tablier de protection.
Gants anti-coupure
Les sculpteurs qui l’utilisent portent généralement un seul gant à la main qui tient l’objet à sculpter. Il est en effet plus rare de se blesser la main qui tient le couteau, exception faite du pouce. C’est d’ailleurs pour cela que certains portent également une protection au niveau du pouce de la main qui tient le couteau (un petit dé de cuir par exemple).
Il faut savoir que la qualité des gants anti-coupure est régie par la norme EN388 sur les gants de protection contre les risques mécaniques. Pour bénéficier de gants d’une véritable qualité anti-coupure il vous faudra rechercher un gant :
- dont la norme est effectivement publiée directement sur le gant (au dos du gant généralement) ou à défaut sur l’étiquette.
- dont la capacité de résistance à la coupure est élevée selon cette norme (voir schéma ci-dessous) :
- le deuxième caractère en partant de la gauche (Coupe Test – norme de 2003) est noté 4 ou 5
- Valeur de protection coupure : de 0 (la plus faible protection) à 5 (la plus forte protection)
- Il est possible que la valeur soit aussi de notée « X » qui signifie alors que le test n’a pas été effectué. Certaines marques préfèrent en effet aujourd’hui ne pratiquer que le test ISO 13997 plus significatif en terme de protection contre les coupures. Cela reste valable au regard de la norme. Se reporter alors à la valeur du cinquième caractère (voir ci-dessous)
- le cinquième caractère en partant de la gauche (Test ISO 13997 – norme renouvelée en 2016) est noté E ou F
- Valeur de protection coupure : de 0 (plus faible protection) à F (plus forte protection)
- C’est surtout cette valeur qu’il faut vérifier car elle est la plus pertinente, prenant en compte le niveau de pression appliqué pour couper le gant. C’est d’ailleurs pour cela que certaines entreprises ne donne plus de valeur pour le deuxième caractère (voir ci-dessus), clairement plus très approprié.
- le deuxième caractère en partant de la gauche (Coupe Test – norme de 2003) est noté 4 ou 5
- dont la forme est ajustée au plus près de votre main. Un gant qui moule littéralement votre main et vos doigts tout en étant à votre taille est idéal dans ce cas.
- dont le revêtement extérieur permet un bonne adhérence des objets :
- les revêtements en latex, en polyuréthane (PU), ou avec des picots ou autre matière adhérente sont notamment intéressants de ce point de vue.
Je vous recommande pour ma part cette paire de gants Rostaing anti-coupure (en photo) en tissu Zirnium (cousin de la Kryptonite…) enduction PU (polyuréthane) pour une protection à la coupure optimale (note F au test ISO 13997). Je l’ai essayé en situation lors de plusieurs petites sculptures et je dois avouer que l’impression générale pour quelqu’un qui ne porte jamais de gant pour sculpter et qui n’aime pas en porter en règle générale (je n’en porte bien souvent même pas pour déroncer mon jardin c’est vous dire !!) est franchement positive. Le gant colle bien à la peau et permet une très bonne préhension. J’avoue ne pas avoir oser simuler un coup de couteau avec ma main dedans mais les coups de couteau que j’ai donné une fois ma main enlevée n’ont laissé aucune coupure sur le gant. Un rien bluffant donc.
Dernière précision sur les gants : il faut savoir que la grande majorité des gants anti-coupure ne vous protège pas contre les coups de pointes de couteau. La norme EN 388 le précise explicitement. Les seuls couteaux qui protègent véritablement – et relativement… – contre les coups de pointe de couteaux sont les gants en cote de maille en métal. Je le sais d’autant plus que j’en ai personnellement porté au quotidien un temps (que les moins de 20 ans…) lorsque je travaillais en abattoir.
Doigt de protection en cuir
Pour ceux que les gants dérangent mais qui souhaitent quand même une protection de certains doigts trop souvent entaillés à leur goût, quelques e-commerces de loisirs créatifs proposent des doigts en cuir qui permettent d’obtenir une protection ciblée.
Perles and co proposent ces doigts de protection en cuir à un coût plus qu’abordable. Pour les plus manuels d’entre vous, un morceau de cuir et un peu de fil et une aiguille sont tout ce dont vous avez besoin pour vous les confectionner vous-mêmes.
Sparadrap
Certains sculpteurs n’aime pas porter des gants (je les comprends) mais souhaite néanmoins se protéger légèrement les doigts contre les petites coupures. Ceux-là trouvent généralement pratique de scotcher certains de leurs doigts de sparadrap.
C’est donc une option pour vous si vous êtes dans la même situation, soit que comme eux vous n’aimiez pas porter des gants quand vous sculptez, soit que vous n’en trouviez pas à votre taille (ce qui arrive aussi notamment pour les petites mains dont les tailles sont étrangement plus rarement approvisionnées dans les boutiques et e-commerce).
Sachez simplement qu’il ne s’agit alors que d’une fine protection qui ne vous protègera que contres les coupures relativement anodines. Clairement pas contre de sérieux coups de couteaux. Je rappelle au passage que la meilleure protection contre les « sérieux coups de couteau » restent la technique, la vigilance permanente et les pauses régulières (voir « sphère de sécurité » au chapitre précédent).
Tablier cuir
Certains sculpteurs, dont le légendaire sculpteur suédois Jögge Sundqvist, portent un tablier pour une double protection :
- des jambes, lors des postures de sculpture assises
- et du buste, lorsque les objets à sculpter sont tenus à ce niveau : typique de la sculpture de cuillère par exemple
Vous pouvez dans ce cas opter pour un tablier anti-coupure agréé par la norme EN388 vendu dans des e-commerce spécialisés en EPI pour abattoir notamment. Ou simplement choisir un tablier en toile épaisse ou en cuir, qui vous protègera également assez bien même si peut être à peine autant que les modèles agréés. A vous de voir.
Faut-il porter des protections comme pour le travail du bois avec machine : masque, lunettes et/ou casque anti-bruit ?
Compte tenu du caractère manuel et silencieux de la sculpture sur bois au couteau, vous n’avez besoin d’aucun des attributs classiques de protection du travail du bois moderne avec machines électroportatives ou fixes.
Les machines modernes de travail du bois débitent le bois à très grande vitesse et ce avec un bruit souvent assourdissant. Pour la grande majorité d’entre elles, elles n’ont pas le temps de créer des copeaux mais réduisent littéralement le bois en poussière fine, voire extrêmement fine et donc très nocive pour la santé des menuisiers ou charpentiers. Cette poussière se répand alors partout dans l’atelier et peut être projetée violemment à vos yeux sans que vos paupières aient le temps de réagir. D’où le port généralement conseillé d’un masque, de lunettes, d’un casque anti-bruit et l’ajout fortement recommandé d’un système d’aspiration des poussières.
La sculpture au couteau est bien loin de cet univers ! Je dirais même que c’est en partie pour s’en éloigner qu’on la pratique. Avec la sculpture au couteau, pas de poussière, pas de projections violentes dans les yeux et surtout pas de bruit. On renoue avec le travail du bois silencieux en toute simplicité, à tout moment de la journée et en tout lieu ou presque.
Quel kit de premiers secours en cas de coupure quand on sculpte ?
Malgré toute nos précautions, mieux vaut être préparé pour toute éventualité. Personne n’est en effet à l’abri d’une erreur ou d’un mauvais geste dû à la fatigue ou à tout autre facteur.
Je ne suis ni pompier, ni infirmier du SAMU, ni médecin urgentiste donc si vous souhaitez des informations plus poussées dans ce domaine des premiers secours, je vous recommande de vous adresser à des personnes qualifiées dans ce domaine, la Croix Rouge et la Protection Civile sont de bons partenaires pour cela.
Mais à titre d’information, je vous recommande :
- d’abord de mettre à jour (ou de passer si vous ne l’avez pas encore) votre diplôme de PSC1 (Prévention et Secours Civiques de niveau 1)
- ensuite d’avoir toujours sur vous au minimum les éléments suivants dans une trousse de secours facilement accessible quand vous sculptez :
- Des pansements de toutes tailles
- Des bandes adhésives de sutures, ces petites bandes de scotchs qui collent à la peau et permettent de faire office de suture pour des coupures profondes
- 1 anti-septique pour désinfecter les plaies
- 1 bandage incluant un coussin hémostatique, le bandage israélien notamment est parfait pour cela, pour de sérieuses coupures à flux de sang abondant.
- 1 tourniquet (on ne veut surtout pas penser en avoir besoin mais on est bien content de l’avoir le jour où il faut absolument s’en servir…)
- également d’avoir toujours avec soi un téléphone chargé pour appeler les secours en cas de pépin un peu vilain (pour rappel : 112 sur les smartphones, sinon le 15 pour le SAMU et le 18 pour les pompiers).
- enfin de vous entraîner, même seul, ne serait-ce qu’une fois par an, à un « exercice » de blessure, à la main ou à la jambe. Cela peut paraître anodin mais en matière de premiers secours, la pratique et les automatismes sont cruciaux lorsqu’au moment de la vraie blessure, l’adrénaline vient y mettre son grain de sel, quant ce n’est pas son paquet entier…